Dialogue bucolique
Quand Dialogue bucolique révèle Chépy
« C’est un projet pour ici ! », lance d’emblée Véronique Roland, frappée tout autant par « la force tranquille de la plante » que par « les courbes de la nature du domaine. » En conséquence, « j’y ai vu cette liberté, cet envol, peut-être les ailes du papillon… »
Mais pas que… « J’ai enfin l’impression d’être reconnue pour une force qui était en moi depuis longtemps… »
Un autoportrait que ce Dialogue bucolique, voire une mise en abyme ? « C’est un chemin, un cheminement intime… Le seul qui a un regard critique qui me porte et me pousse, c’est Alain [NDLR, son mari]. Pour ma famille, je suis l’artiste… »
Mais « un projet pour ici » en forme de poupée gigogne…
Avait-elle fini d’installer Dialogue bucolique dans le nouvel écrin dessiné à l’arrière de l’orangerie du château du Domaine Saint Jean de Chépy avec vingt-quatre heures d’avance ? De ses chutes naîtra Chépy, une sculpture – un petit format – magistralement exécutée en… quelques heures et ressemblant au premier projet que Véronique nous avait soumis – et que nous nous étions permis de décliner, le considérant trop ressemblant à quelques œuvres déjà présentes…
Nous avions tort, et Véronique a su nous le prouver à l’aune de son obstination souriante… « Le premier projet, c’était un peu ça ! Le fait de l’avoir réalisé avec les chutes me permet de boucler la boucle et de signer finalement les deux… », s’amuse-t-elle dans un immense éclat de rire.
Tort ? Peut-être pas tant que cela… Car aujourd’hui Chépy et Dialogue bucolique témoignent déjà doublement du passage de Véronique au XVIe Symposium de sculpture de ChépyTerra…
Chapeau l’artiste !
Véronique Roland, l’obstination souriante
Née à Liège (Belgique) entre trois frères et deux sœurs – la parité parfaite, mais « dans un milieu machiste » –, c’est peu dire que Véronique Roland aura cherché. Sa voie, son medium, son esthétique. Et surtout sa place !
« Toute petite, je tripotais déjà des papiers, je chipotais beaucoup… », campe dans un immense sourire sonore la seule artiste de la fratrie. Qui paraît constamment ajouter à l’humour national belge une solide dose de bonne humeur personnelle.
Sauf que cet inconscient collectif et ce trait de caractère ne sauraient occulter une détermination confinant parfois à l’obstination. Mais une résolution patiente, bienveillante, qui se plaît de surcroît à emprunter les chemins de traverse. Car lorsqu’elle a fini d’égrener ses formations, on se surprend tout simplement à lui demander ce qu’elle n’a pas appris…
Déjà, « pour aller en artistique, j’ai dû batailler… », confesse-t-elle volontiers. Professeure d’arts plastiques, Véronique peindra beaucoup, dessinera peut-être encore plus, se mariera, élèvera ses enfants…
Jusqu’à cette fameuse exposition où un critique lui ouvrira finalement les yeux d’une seule et simple phrase : « Tu n’es pas peintre, mais sculpteur… » Comme quoi, les journalistes – et leurs formules lapidaires – ont (parfois…) leur utilité… Celui-là lui écrit en tout cas toujours ses textes.
De ce parcours, Véronique Roland ne conserve qu’un seul regret, celui que ses parents n’aient jamais pu voir sa sculpture.
Mais sait-on jamais…
Polyglotte des techniques et des matériaux pour affirmer la féminité et la force
« C’est la matière que j’aime ! Les outils et la matière… » Ce cri du cœur pourrait résumer l’œuvre de Véronique Roland, qui entend « la laisser vivre et la dompter. Je me suis lâchée dans l’idée… », ponctue-t-elle d’un souffle.
Professeure d’arts plastiques, « je me faisais du bien quand je rentrais de l’école. J’adorais mon métier, mais c’était parfois dur… », rigole-t-elle volontiers.
Car enseigner est une chose, pratiquer en est une autre.
« J’ai commencé par la pierre », pose-t-elle avant d’expliquer très sérieusement avoir enchaîné avec « une formation sur la terre. » Ce sera ensuite le bois – au Centre de la marionnette liégeoise – puis la fonderie « avec un formateur de Ouagadougou. » La soudure ? « J’ai fait ça à l’école… » avant le thermoformage. Aujourd’hui, « j’aimerais apprendre le cuivre battu et les dalles de verre », déroule-t-elle encore.
Décelant sans doute une once d’étonnement dans le regard de son interlocuteur, Véronique Roland tient alors à bien mettre les points sur les i : « Je suis indépendante sur la technique dans mes recherches ! » Et le béton pourrait encore bientôt faire les frais de cette indépendance…
Dans le fond, « ce qui m’intéresse, c’est d’affirmer la féminité et la force ! » Sur la forme, « j’aime les arrondis, les angles et les droites. Et l’imprévu me plaît beaucoup… »
En d’autres termes, « j’ai voulu prendre ma place ! Cela a influencé mon travail jusqu’aux grands formats », résume cette adepte de l’obstination souriante plus que de la force tranquille…
Site internet : www.veroniqueroland.be